jeudi 10 juin 2010

Eglise mennonite

LES EGLISES MENNONITES

Dès 1525 à Zurich, un petit groupe de croyants s'opposa à Zwingli, lui reprochant de préserver un lien entre l'Eglise "réformée" et l'Etat et de maintenir l'Eglise dans un lien de dépendance. Puis ils se montrèrent hostiles au Baptême des enfants, encourant pour cela des persécutions. Quelque dix ans plus tard, Simon Mennon, ancien prêtre catholique, se voua à l'apostolat du baptême des adultes repentants et professants. Il rebaptisa donc les adultes, d'où l'épithète "anabaptisme" donné à ce mouvement. Les mennonites protestent cependant quand on cherche leur origine dans le mouvement de révolutionnaires qui, regroupés autour de Thomas Muenzer puis de Jean de Leyde, à Mnster en Westphalie, pratiquèrent le fanatisme religieux, se vantant de bénéficier de révélations particulières, refusant de baptiser les enfants, rejetant la loi biblique et prêchant l'opposition à toute forme d'autorité civile. Ils soutiennent que cette parenté est historiquement fausse, qu'ils ne sont pas des descendants assagis de ces fanatiques.
Simon Mennon (1492-1559) se contenta d'enseigner que le Baptême des petits enfants, surtout quand ils étaient nés de parents incroyants, ne servait à rien, que le sacrement n'avait de valeur que lorsqu'il était sollicité et reçu avec foi. Constatant l'indifférentisme religieux des masses et le formalisme de leur piété, et peu satisfait de la prédication des Eglises officielles, il évangélisa la Hollande et le Nord de l'Allemagne (Lbeck, Hambourg). Les gens qu'il gagna à son message suscitèrent une vive opposition dans leur entourage, due en grande partie à leur refus d'admettre quelque autorité que ce fût de l'Etat sur l'Eglise. La tête de Mennon fut mise à prix et ses adeptes se réfugièrent nombreux en Angleterre où Henri VIII finit par les persécuter à son tour. Peu d'Eglises ont connu autant de martyrs. Mais le mouvement se répandit en Allemagne, Hollande, Angleterre et en Suisse.
Cent ans plus tard, la colonie quaker de William Penn qui donna son nom à la Pennsylvanie, invita les mennonites à venir s'installer en Amérique du Nord. Beaucoup d'entre eux y émigrèrent et établirent la première colonie à Germantown; de là ils se répandirent dans l'Ohio, l'Indiana, l'Illinois, les Etats de l'Ouest et le Canada. D'autres allèrent en Prusse, en Russie et en Pologne.
Les mennonites signèrent en 1632 une confession de foi à Dordrecht qui expose en 18 articles leurs convictions et à laquelle ils souscrivent dans leur grande majorité: Dieu créateur, chute et restauration de l'homme au retour du Christ, divinité de Jésus, Rédempteur du monde, obéissance à la "Loi de l'Evangile" (!), Baptême des adultes comme témoignage public de la foi, prohibition des mariages avec les non-croyants, obéissance due aux autorités civiles, mais refus de porter les armes et de prêter serment, jugement dernier des justes et des injustes. L'accent est mis sur la conversion personnelle et la régénération de chaque croyant par le Saint-Esprit. La Sainte Cène est un repas commémoratif, symbole du sacrifice du Christ et acte de consécration. Sa célébration a généralement lieu deux fois par an et est suivie du lavement des pieds et du baiser de la paix. Quant au Baptême, il peut être administré par aspersion ou par immersion.
Les mennonites sont très attachés à certaines grandes valeurs chrétiennes et ont un penchant pour le puritanisme. Ils s'astreignent à une vie religieuse et morale exemplaire, s'abstiennent de toute souillure, pratiquent la prière en famille, la lecture de la Bible, le respect des parents, l'amour et le refus de toute vengeance personnelle et de toute résistance au mal par la force, l'observance du repos dominical et une grande charité (oeuvres de bienfaisance et organisations charitables dans de nombreux domaines). Ils refusent les charges publiques et manifestent un grand esprit d'entraide.
Il existe, surtout parmi les Eglises mennonites américaines, une grande diversité dans la doctrine et surtout la discipline. Cependant elles s'accordent tous pour professer que l'union mystique de l'individu avec le Christ se manifeste dans la pureté extérieure de la communauté. C'est pourquoi ils pratiquent avec zèle la discipline ecclésiastique avec excommunication des pécheurs impénitents.
Les mennonites américains connurent de nombreux schismes, dus essentiellement à des divergences d'opinions sur des questions de discipline. On distingue chez eux trois courants: 1) Les conservateurs représentés par certains groupes dont les Amish, branche intégriste fondée en Suisse au XVII° siècle, par Jacob Amman. Réfugiés aux Etats-Unis au cours du siècle dernier, ils sont persuadés que l'excommunication par l'Eglise doit entraîner aussi l'exclusion du groupe et même de la famille, refusent tout progrès technique, y compris l'électricité, et s'efforcent de vivre comme des ruraux du XVII° siècle, donnant le spectacle insolite d'un ghetto religieux d'une autre époque (longues barbes, habillement à l'ancienne sans boutons qui sont dits évoquer le luxe ou l'armée, coiffes austères, prohibition de toute forme de maquillage, calèches avec attelages, fidélité à l'allemand et refus de parler l'anglais, renoncement aux études au-delà de la scolarité obligatoire, etc.). Des colonies semblables se sont installées en Crimée et ont connu, comme les Amish et autres mennonites conservateurs américains, des dissensions à propos de l'immersion ou de la sanctification parfaite. 2) La Mennonite Church que rejoignirent bon nombre d'Amish et qui représente un conservatisme modéré fortement impliqué dans la pédagogie, la philanthropie et la mission. Les mennonites français s'apparentent à eux. D'autres communautés mennonites américaines se situent dans la même mouvance, mais insistent sur la sanctification parfaite, la guérison divine et l'immersion. 3) La General Conference organisée en 1860 regroupe les mennonites partisans d'une interprétation plus libérale des règles de discipline concernant le couvre-chef des femmes quand elles prient, le lavement des pieds, la non-conformation au monde et l'excommunication.
A l'origine, les Eglises mennonites étaient dirigées par des laïcs, d'humbles "exhortateurs ou consolateurs". Aujourd'hui elles forment leurs pasteurs. Les candidats au ministère doivent recevoir l'approbation du "consistoire des pasteurs" et être consacrés. Les mennonites sont congrégationalistes: chaque Eglise locale garde son autonomie, mais certaines tâches sont coordonnées par des réunions régionales ou nationales.
On compte environ 500.000 mennonites dans le monde, divisés en plusieurs branches d'obédience plus ou moins rigoriste: 300.000 aux Etats-Unis, 50.000 en Russie, à peu près 10.000 en France, essentiellement en Alsace-Lorraine, à Montbéliard, dans le territoire de Belfort et en région parisienne.

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